La Martinique présente la singularité d'être constituée de plusieurs petites îles volcaniques qui se sont formées les unes à côté des autres, avant d'être réunies par des ponts volcaniques.
Tout semble commencer au début du Miocène, sur un soubassement volcanique (complexe de base) plus vieux que 24 Ma, l'activité volcanique reprend entre 19 et 18 Ma pour donner des édifices volcaniques qui sont aujourd'hui bien érodés. Les Presqu'îles de Sainte-Anne et de la Caravelle sont alors des îles volcaniques séparées par un canal inter-île.
Le Petit Nègre, volcan éventré exposant des gerbes d'orgues d'andésite, ici photographié, a participé entre autres à la construction de l'île de la Caravelle.
Entre 17 et 7 Ma l'activité volcanique d'abord sous-marine se poursuit plus à l'ouest le long de fissures orientées NW-SE. Une multitude de bouches éruptives se relaient pour déboucher filialement sur la formation de l'Archipel Miocène de Martinique.
Un petit bouquet d'îles se forme dans la région du Vauclin, La Montagne du Vauclin, ici photographiée, en est la figure emblématique. De nouvelles îles émergent plus à l'ouest au niveau de Ducos et de Rivière Pilote.
In fine, avec le fonctionnement de la chaîne fissurale du Morne Pavillon, l'île du Sud-ouest émerge et finit par phagocyter les îles déjà formées. La partie sud de la Martinique commence à prendre corps.
L'activité volcanique se déplace ensuite vers le nord pour former le volcan bouclier du Morne Jacob dont les coulées finissent par atteindre l'île du Sud-ouest. Entre 5,5 et 2,2 Ma, ce volcan a craché de grosses quantités de d'andésite. A lui tout seul, il occupe le tiers de la surface de la Martinique.
Après un longue phase de repos, l'activité volcanique reprend au niveau de la Presqu’île du Sud-ouest entre 3 et 0.035 Ma. Une multitude de petits massifs volcaniques autonomes se relaient au cours du temps pour déboucher sur la formation d'un véritable écrin de petits volcans. Le Morne Larcher, encore appelé "la femme couchée" en est la figure emblématique. Rechercher la silhouette de cette femme, elle se cache dans le paysage.
Vers 1.85 Ma, l'activité volcanique recommence sur les contreforts-ouest du Morne Jacob pour former le complexe du Carbet. Vers 345 000 ans, une déstabilisation de flanc ponctue la vie de ce complexe volcanique. Elle met pratiquement à nu la chambre magmatique et permet la remontée d'une lave riche en silice et relativement froide. Cette lave, qui aurait du poursuivre sa cristallisation en profondeur, arrive en surface et permet l'érection de dômes aux pentes abruptes encore appelés pitons.
Complexe du Mont Conil : 1 - 0,4 Ma
Vers 1 Ma, l'île du Mont Conil émerge au nord de la Martinique, elle en est séparée par un canal inter-île. Son activité volcanique progresse régulièrement vers le sud pour déboucher sur le comblement du canal avec l'émersion de la Montagne Pelée.
Rendue célèbre à travers le monde par sa nuée ardente du 8 mai 1902 qui fit 28 000 victimes, la Montagne Pelée est active depuis 300 000 ans. Aujourd'hui, on pense qu'elle fait partie du complexe du Mont Conil en raison de la forte similitude de la composition chimique des laves.
Ce complexe a connu au cours de son histoire trois importantes déstabilisations de flancs, dont les cicatrices sont observables dans le paysage et dont les dépôts sous-marins ont été carottés et étudiés. La photo ci-dessus montre le point de départ de la dernière déstabilisation de flanc nouvellement datée de 36 000 ans. Le Morne Lénard, qui se trouve au premier plan au sein de cette cicatrice, est un méga-bloc de glissement resté accroché sur le flanc ouest de la Montagne Pelée.
Depuis 24 Ma, en dépit des migrations nord-sud, on assiste à un déplacement continu et régulier de l'activité volcanique de l'est vers l'ouest, cela se traduit par la juxtaposition de trois arcs volcanique :
1) L'arc externe avec le volcanisme ancien de Sainte-Anne et de la Caravelle
2) L'arc intermédiaire avec les chaînes volcaniques Miocène de la Martinique (François/Robert, Vert-Pré, Vauclin/Pitault/Sainte-Marie, Ducos/Rivière-Pilote, chaîne fissurale du Morne Pavillon, Complexe de Trois-Ilets)
3) L'arc externe, avec le volcanisme récent de la côte caraïbe (Presqu'île du Sud-ouest, Complexe du Carbet, Complexe du Mont Conil, Montagne Pelée) .
Une telle disposition se retrouve t elle au niveau des autres îles des Petites Antilles?
Au niveau de la Martinique :
Les trois arcs volcaniques sont présents avec un léger décalage vers l’ouest. Il y a une juxtaposition des formations volcaniques.
Au sud de la Martinique :
Les trois arcs sont présents mais totalement superposés, il y a un entassement des formations volcaniques.
Au nord de la Martinique :
Les arcs volcaniques interne et externe sont totalement dissociés.
L’arc intermédiaire est totalement absent.
Les formations volcaniques de l’Arc externe sont recouvertes de calcaires marin d’âge Miocène.
Les parties émergées de l’Arc interne ont moins de 6 Ma.
Au Miocène, alors que l'activité volcanique se poursuit en Martinique et dans les îles du sud, elle s'arrête dans les îles du nord qui sont par la suite immergées et recouvertes de calcaire. Seul le banc de Saba semble avoir momentanément échappé à cette immersion, avant d'être à son tour immergé au Pliocène.
A la fin du Miocène et avant l'émersion des îles de l'arc interne qui a eu lieu au début du Pliocène (6 Ma), il y avait un véritable désert insulaire au nord de la Martinique. Toute la biodiversité primaire des Petites Antilles se trouve alors concentrée au niveau de l'Archipel Miocène de Martinique, des îles des Petites Antilles situées plus au sud et du banc de Saba resté émergé.
L'ensemble de ces îles ayant échappé à l'immersion constitue l'Arche de Noé des Petites Antilles.
La Martinique est la seule île des Petites Antilles à présenter une juxtaposition de trois arcs volcaniques, ce qui est la conséquence d'un déplacement régulier d'une activité volcanique continue depuis 25 Ma.
En conséquences, contrairement à ce qui s'est produit dans les îles du sud de l'Arche de Noé où la superposition des éruptions volcaniques a du exercer une effet très destructeur sur la biodiversité initiale, la Martinique a conservé sa biodiversité initiale tout en lui offrant de nouvelles îles à conquérir.
Mais en réalité, tout ne commence pas au début du Miocène, les volcans de Sainte-Anne et de la Caravelle s'installent sur les contreforts-ouest de volcans beaucoup plus vieux et aujourd'hui totalement érodés (complexe de base). Une Proto-Martinique existait depuis déjà bien longtemps. Pour bien comprendre l'histoire géologique de la Martinique, il faut la replacer dans son contexte caribéen.