Cette sous-unité est la plus méridionale de la presqu’île, et, au niveau du Morne Larcher, la plus excentrée et la plus détachée du corps principal de l’île.
De ce fait, ce Morne est entouré seulement par la mer sur presque tout son pourtour, et ne bénéficie pas, comme le Morne La Plaine, de l’ascension et de la condensation des masses d’air provoquées par des mornes adjacents d’altitude similaire. A altitude égale (400m) le Morne Larcher possède un climat étonnement sec par rapport au morne La Plaine, et le Morne Clochette semble pâtir du même micro climat régional.
La comparaison des groupements végétaux des deux plateaux d’altitude quasi égale (400 m) du morne La Plaine et du replat du Morne Larcher, et surtout celle des pentes (non déboisées) sous ces derniers, est tout à fait démonstrative. En dépit du déboisement et de l’exposition directe à la chaleur du soleil, le plateau du Morne La Plaine présente ici et là des parties humides colonisées par la Siguine : Dieffenbachia seguine, des arbres mésophiles disséminés dans les bosquets relictuels comme le Pois doux poilu : Inga ingoides, le Bois blanc : Simarouba amara, le Mahot grandes feuilles : Cordia sulcata, le Café bois de montagne : Maytenus guianensis. Dans les pentes sommitales est et nord du morne La Plaine on observe des sujets adultes du Pain d’épices : Pouteria dussiana, du Contrevent : Pouteria semecarpifolia, du Balata : Manilkara bidentata, du Savonnette grands bois ; Lonchocarpus heptaphyllus, de l’Olivier grands bois : Buchenavia tetraphylla, du Bois lélé : Quararibea turbinata, du Pomme rose (naturalisé) : Sizigium jambos. Aucune de ces 11 espèces arborées mésophiles n’existe sur le plateau sommital et les pentes supérieures du Morne Larcher. Le Morne Clochette est encore plus sec que le Morne Larcher car beaucoup plus dégradé et d’altitude inférieure.
Bien que soumises à l’un des micros climats les plus secs de la presqu’île (avec la sous-unité Morne Réduit Morne Gallochat), les forêts du Morne Larcher, du moins au-dessus de 200 m d’altitude, ne peuvent être qualifiées de semi décidues tropicales. Elles comportent au-dessus le l’altitude précitée une proportion impressionnante de Bois d’Indes : Pimenta racemosa, essence à 100% sempervirente qui, dans les formations boisées de ce Morne constituent entre le tiers et, vers son sommet, les deux tiers de la strate supérieure. Les autres espèces arborées de strate supérieure sont essentiellement des « Poiriers » : Tabebuia heterophylla, des Bois rouges : Coccoloba swartzii (sempervirent, sauf en saison sèche d’une exceptionnelle sévérité) des Bois savonnettes : Lonchocarpus punctatuset des Mapous : Pisonia fragrans (également sempervirents à 100%) disséminés entre les Bois d’Inde. La structure de la strate supérieure est donc celle de la forêt sempervirente saisonnière tropicale secondaire.
Les conditions topographiques et édaphiques extrêmement dures (très forte déclivité générale et forêt presque entièrement établie sur chaos de roches et de blocs andésitiques) réduisent encore la disponibilité en eau utile des plantes et déterminent des groupements nettement xériques (et cependant foisonnants) , surtout au niveau des arbustes et des plantes de sous-bois (nombreuses Broméliacées xérophiles épilithes ou épiphytes : Guzmania lingulata, Aechmea lingulata, Tillandsia utriculata, Pitcairnia angustifolia, abondance de Pipéracées plus ou moins crassulencentes : Peperomia myrtifolia, Peperomia magnolifolia, cactées lianescentes : Hylocereus trigonus. En dépit de ces conditions limitantes la partie supérieure du Morne Larcher, par suite de sa quasi inaccessibilité, a pu préserver jusqu’à aujourd’hui, un certain nombre d’espèces végétales qui faisaient partie des forêts primitives des zones sèches de la Martinique et qui ont disparu partout ailleurs dans l’île (et même dans les autres îles) comme Xylosma buxifolium : Attrape-sot, Ternstroemia pedoncularis : Bois vert, Colubrina elliptica : Bois mabi, ou qui sont devenues excessivement rares comme le Bois noyer : Zanthoxylum flavum ou rares et surtout à très petites populations comme le Petit boui : Sideroxylon obovatum, et le Bois vert : Rochefortia spinosa.
En conclusion une sous-unité profondément originale par ses conditions bioclimatiques et édaphiques très particulières, par l’extraordinaire foisonnement d’épiphytes et d’épilithes de la partie supérieure du Morne (notamment au niveau du petit plateau sous le sommet), par les espèces rares qui y trouvent refuge et par celles qui restent à découvrir car il est certain que ce secteur de la Martinique est grandement sous-exploré botaniquement. Cette sous-unité, dans sa partie Morne Larcher et au-dessus de la courbe de niveau des 250 m peut être définie comme relevant de la forêt sempervirente saisonnière tropicale secondaire d’horizon inférieur et à présence relictuelle d’espèces climaciques.
En-dessous de ce niveau les Bois d’Inde deviennent rares ou disparaissent alors que les Tabebuia heterophylla deviennent surexprimés et la forêt tend vers le type semi-décidu tropical.
La section Morne Clochette de cette sous-unité, de climat quasi similaire mais constituée d’une formation végétale beaucoup plus dégradée dans le passé (coupe à blanc probable jusque vers le niveau 150 m et prélèvements partiels au-dessus), relève simplement, à niveau altitudinal identique, de la forêt sempervirente saisonnière tropicale secondaire d’horizon inférieur et à présence quasi nulle d’espèces climaciques. La partie la plus inférieure est un stade arbustif de cette même formation, haut de 1,5 à 4 m et âgée d’une vingtaine ou d’une trentaine d’années, dominé par les Crotons guildingii, hircinus, bixoides, les Myrtacées Eugenia cordata var. sintenisii Myrcia citrifolia, les Campêches et le Petit Mapou : Pisonia suborbiculata. Sous ces espèces arbustives se réinstallent la plupart des espèces arborées de la forêt sempervirente saisonnière tropicale secondaire évoluée : Bois rouge : Coccoloba swartzii, Prune bord de mer : Cassine xylocarpa, Bois d’Inde : Pimenta racemosa, Bois citron : Maytenus laevigata, Bois chandelle : Amyris elemifera et même Acomat franc : Sideroxylon foetidissimum. Cette partie pré forestière de la couverture végétale est loin d’être sans intérêt et ne doit pas être cyniquement sacrifiée. La dynamique et la potentialité sont excellentes et il suffirait désormais de laisser la nature faire son œuvre pour parvenir en moins d’une cinquantaine d’année, et pratiquement sans dépense d’argent public ou privé, à une belle forêt secondaire de 15-18 m de haut préservant l’unité du paysage, les sols, les ressources hydriques et la fraîcheur.